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08/07/2009

L'encyclique : premières impressions

 La foi au Christ est la mère de toutes les audaces :


 

Un document pareil ne se résume pas. Que chacun le lise, crayon en main ! Une erreur en tout cas est à ne pas commettre : c'est d'aller chercher dans l'encyclique les passages qui plairaient à telle ou telle sensibilité. Les uns pour souligner que le pape prône le droit à la vie (ce n'est pas une surprise), les autres pour se féliciter qu'il plaide pour l'économie solidaire, ou pour les pays pauvres, ou pour la régulation de la finance, ou pour le retour de l'Etat, ou pour de nouvelles formes du politique... Tout ça est vrai : mais l'essentiel est ailleurs et il ne faut pas privilégier tel ou tel angle. L'erreur surtout serait d'extraire de l'encyclique des « condamnations » et autres « mises en garde », pour les huer ou les applaudir. L'encyclique ne condamne pas. Elle prend la mesure du système actuel, décrivant au passage ses vices de conception ou de fonctionnement ; mais c'est pour indiquer les voies d'un dépassement et d'une nouvelle construction.

Le mot « nouveau » revient très souvent dans Caritas in veritate. L'encyclique fait des propositions qu'une partie des catholiques français n'ont pas l'habitude d'applaudir, et que la quasi-totalité des journalistes français n'ont pas l'habitude d'entendre de la part du Saint-Père. Comme les alter-mondialistes, le pape souhaite une gouvernance mondiale polyphonique, conforme aux principes de subsidiarité et de solidarité, et dotée de pouvoirs réels... Comme les philosophes de l'anti-utilitarisme, il propose d'introduire la dimension de la gratuité dans l'économie... Comme les amis de la « décroissance », il appelle les Occidentaux à diminuer leur consommation d'énergie...

On pourrait jouer sans fin au jeu des apparentements, et cela ne mènerait pas à l'essentiel. Le voici, à mon avis : cette encyclique fait avancer de front une série de propositions audacieuses, voire révolutionnaires, mais elle enracine ces audaces dans une vision transcendante du destin de l'homme – et de la vie humaine – comme don de Dieu créateur : un Dieu Père universel, dont la paternité nous permet d'être tous frères. D'où la conception chrétienne de la solidarité fraternelle, qui, prise au sérieux, peut engendrer des réalisations sociales sans précédent. Ainsi la foi pleine et entière produit des effets dérivés surprenants ! Pendant des dizaines d'années, les catholiques français ont cru qu'il fallait choisir entre la foi et les audaces sociales ; Benoît XVI (à sa manière professorale et théologienne) leur démontre qu'il n'en est rien. On peut être rebelle et fidèle. On est d'autant mieux rebelle que l'on est fidèle.

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Commentaires

PAS LE CONTRAIRE

> Mon impression recoupe la vôtre, mais un texte de cette envergure ça demande plusieurs lectures successives ! En tout cas oui, la dernière des choses à faire serait d'aller à la pêche dans ce document pour y chercher des confirmations de nos petites idées préalables. C'est à l'encyclique de nous changer les idées, pas le contraire. Quelles perspectives !

Écrit par : Churubusco | 07/07/2009

CERTAINS

On y voit souvent le mot "travailleur", c'est un terme que l'on n'entend plus beaucoup (on préfère les "clients", ce qui dispense de s'interroger sur les sources de leur fortune).
Dans la mesure où il parle de l'avortement et semble traiter tous les aspects du "développement", certains trouveront :
- qu'il n'évoque pas la condition particulière des femmes
- qu'il n'évoque pas le rôle de l'instruction et de l'éducation
- qu'il n'évoque pas la question des régimes politiques
Tous ces choix ont un sens, que certains interprêteront de façon politique (en gros : c'est un horrible réactionnaire, macho, maurrassien).
Je crois qu'il faut s'attendre à se battre là-dessus ...
Julius

[ De PP à J. - En tout cas pas maurrassien, puisqu'il "n'évoque pas la question des régimes politiques" ! ]

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Écrit par : Julius | 07/07/2009

> Rebelle parce que fidèle !

Écrit par : Michel de Guibert | 07/07/2009

LA CONTINUITE

> Sur l'encyclique "Caritas in veritate" : elle insiste dès son début sur la continuité entre l'enseignement social des papes, au fil des situations historiques changeantes : développement organique cohérent. Benoit XVI consacre un chapitre entier à l'encyclique de Paul VI "Populorum progressio", et montre en quoi ses idées directrices sont toujoiurs valables. Donc on a tort de prétendre que les encycliques se contredisent et sont écrites sous la dictée de "lobbies", comme je l'ai entendu dire par un non catholique il y a quelques jours à la radio.

Écrit par : Philippe | 08/07/2009

CHALMIN

> Hier soir sur KTO, le débat était très intéressant entre Mgr Podvin et JM Andrès des AFC, mais Philippe Chalmin, l'économiste libéral de service (pourquoi n'invite-t-on toujours que des libéraux en fait d'économistes ?), a été aussi décevant qu'on pouvait s'y attendre.Parlant tout le temps, ce personnage perpétuellement invité sur toutes les chaînes a asséné plusieurs faussetés. Par exemple affirmant que l'encyclique ne parle "presque pas" de l'Etat ! Venant d'un libéral cette affirmation joyeuse ne surprend pas, le malheur est qu'elle est fausse. L'encyclique déplore que l'Etat ait abdiqué naguère en faveur de la finance, et elle insiste sur le retour de l'Etat pour remédier au chaos actuel. Et chaque fois qu'elle parle de réformer le système mondial, elle insiste sur le rôle des Etats. Chalmin est bien un catho-libéral, il ne voit et n'entend que ce qui va croit-il dans son sens ; le reste, il l'oublie.

Écrit par : Michel-André | 08/07/2009

CLAIR, SIMPLE, FORT

> Toujours cette clarté, cette simplicité, cette force du bon pape Benoît. Ma première impression est que cette encyclique dépasse la doctrine sociale de l’Eglise pour la connecter à une doctrine de la vie à large vue, une doctrine de la vie humaine, personnelle et sociale, et fraternelle, en lien avec la Communion trinitaire, Père, Fils et Saint-Esprit. Dans ce texte magistral, le Saint-Père démontre que sans le respect de cette dignité humaine et sans la recherche de « l’amour dans la vérité », la quête du développement humain intégral, subsidiaire et solidaire, au service du bien commun, que prône l’Eglise et qui demeure un désir profond de l’humanité, ne peut aboutir. Sans cette transcendance du regard et des actes, ni l’économie, ni l’écologie, ni le progrès social, ni le développement des peuples ne peuvent véritablement être porteurs de sens et produire de beaux et bons fruits pour la famille humaine. Et Benoit XVI d’appeler en fin de compte à une ferme résistance des hommes et des sociétés aux « prodiges » trompeurs de la technique et de la finance… Le Saint-Père demande que l’une et l’autre se soumettent à l’éthique et à la responsabilité morale (« 65 (…) Les opérateurs financiers doivent redécouvrir le fondement véritablement éthique de leur activité (…) ». « 70 (…) la liberté humaine n’est vraiment elle-même que lorsqu’elle répond à la fascination de la technique par des décisions qui sont le fruit de la responsabilité morale »).
Les grands opérateurs de l’économie mondialisée et les penseurs de l’ultralibéralisme accepteront-ils enfin de répondre, en vérité, à ce questionnement éthique et moral ?

Écrit par : Denis | 08/07/2009

METIERS

> Vous m'épatez tous ! L'encyclique est sortie hier, et vous avez tous eu le temps de la lire ? Aucun d'entre vous n'a de métier ? Ou vous êtes déjà tous en vacances ? Pour ma part, je vais l'imprimer et l'emporter en Bretagne...
Edouard

[ De PP à E. - Pardon, mais C'EST mon métier ! ]

Écrit par : Edouard | 08/07/2009

VERSION PAPIER

> Quant à moi, j'avoue avoir du mal à bien lire sur un ordinateur de longs textes, d'autant plus que l'on ne peut les annoter. Je vais l'acheter et la lire tranquillement en version papier. A part ça, on voit déjà sur certains sites le découpage d'extraits qui justifient selon eux le libéralisme et la non-intervention de l'Etat. De même, je n'ai pas regardé l'émission de kto car n'ayant pas lu le texte, j'ai peur d'avoir du mal à suivre un débat à son sujet. Effectivement, il y a pas mal de gens qui parlent déjà de l'encyclique alors qu'elle est à peine sortie. Je ne parle évidemment pas de ceux dont c'est le métier, comme dit PP.
vf

[ De PP à VF - Il faut s'arcbouter pour empêcher la déformation de l'encyclique par les libéraux. Escomptant que peu de gens liront "Caritas in veritate", ils misent sur l'effet de rumeur, comme à l'époque de "Centesimus Annus" où l'on fit croire que Jean-Paul II s'était rallié au libéralisme (ce que continuent à dire aujourd'hui des personnalités qui n'ont toujours pas lu "C.A." !).
Pour s'amuser : fureur sourde chez les catho-libéraux, obligés de ratiociner pour ne pas avouer que l'encyclique les placardise ; ahurissement chez les nationaux-papistes, découvrant que le pape est pour une gouvernance mondiale (certes respectueuse de la subsidiarité et des valeurs, mais mondiale tout de même). Quant aux pseudo-cathos xénophobes, ils sont obligés de zapper les très nombreux développements de l'encyclique ayant trait aux pays pauvres (dont ils n'ont rigoureusement rien à faire).
C'est bon, les faux-semblants se dissipent.]

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Écrit par : vf | 08/07/2009

à VF

> Joie ! Le pape Ratzinger reprend sa stature de grand non-conformiste, capable de faire surgir de la tradition la nouveauté ! Même ses adversaires doivent constater que l'encyclique n'a rien à voir avec la boutique d'antiquaire des intégristes.

Écrit par : Rysum | 08/07/2009

à RYSUM

> Non seulement avec la boutique d'antiquaire mais rien non plus avec une vision du monde faite de cloisonnements et d'hostilités. Je ne vois pas comment un ultradroitiste peut lire cette encyclique sans se sentir mal à l'aise. Benoît XVI recommande la décroissance de notre consommation d'énergie et une politique redistributive mondiale ! C'est de l'altermondialisme chrétien. Juste impossible à avaler pour l'ultra.

Écrit par : Michael | 08/07/2009

RESOLUTIONS

> Et moi qui passe ces dernières semaines à trier mon fatras dans la maison, avec ces objets "au-cas où" qui languissent sur toutes les étagères, me voilà encouragé par le pape lui-même ! Je viens par exemple d'apprendre que la Javel ne nettoie pas, mais que les publicitaires jouent sur la peur des microbes pour nous en vendre à tout prix. En réalité elle ne sert à rien dans un ménage. Et moi qui croyait que c'était indispensable, alors que l'eau et des chiffons microfibres remplacent presque tous les produits qu'on nous vante depuis des années à la TV !
Etant convaincu qu'il faut d'abord me changer moi-même et harassé par tant de mensonges commerciaux, voici donc mon programme de l'année :
- faire d'abord la révolution à la maison en ne gardant que l'essentiel dans TOUS les domaines (en m'inspirant du blog zenhabits, ou de celui de Jaffa et de Greenpeace pour le ménage).
- stopper mon réflexe de l'acheteur compulsif (c'est plus facile quand on sait ce qu'on a réellement besoin et en évitant les grandes surfaces)
- lire l'encyclique du pape pour mieux gérer mon argent par exemple, et pour vivre de la liberté des enfants de Dieu !
En tout cas, merci de m'avoir mis l'eau à la bouche. Tous ces commentaires me donnent envie de la mastiquer.
Un question encore: est-ce que la doctrine sociale de l'Eglise ou cette encyclique parle-t-elle de la dîme, d'un 10% pour les pauvres ? Ou est-ce seulement une habitude de certains chrétiens?

Écrit par : Théophile | 08/07/2009

UNE PERLE DE CHALMIN

> A propos de la gouvernance mondiale, Philippe Chalmin paraissait très embarrassé, sur Kto :
"Ce n’est pas très développé", prétendait-il. "C’est un peu un vœu pieux".
Et enfin une perle :
"Ce n’est pas le centre de son propos... Parce que le centre de son propos, c’est de recentrer tout sur l’homme."
La contradiction dans cette phrase est flagrante : c'est justement parce qu'il recentre tout sur l'homme, que le Pape veut nous parler de gouvernance mondiale.

Écrit par : Blaise | 09/07/2009

"GRANDE JOIE EN EFFET"

> Oui, Rysum, joie, grande joie en effet, pleine de l'Esprit Saint. Quant au non-conformisme, il n'est pas propre à Benoît XVI, mais à l'Eglise toute entière depuis 2000 ans. Exemple : la notion "d'humanisme intégral", récurrente dans cette magnifique encyclique, est aussi le titre d'un ouvrage magistral de Jacques Maritain, publié en juillet 1936 ! Infinie patience, inlassable effort de l'Eglise et de ses prophètes pour dire aux hommes l'amour dans la vérité.

Écrit par : Frédéric Ripoll | 10/07/2009

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